Mondial et prostitution : une dérive honteuse des évènements sportifs

Mondial et prostitution : une dérive honteuse des évènements sportifs

Il n’échappe à personne que des évènements sportifs internationaux, comme la Coupe du monde ou les jeux olympiques, aiguisent les appétits financiers les plus féroces, mais, les violences envers les femmes qu’ils occasionnent sont en revanche ignorées : viols d’athlètes féminines habilement tus, délégations olympiques non mixtes … Tout comme en période de guerre, lorsque des hommes s’affrontent, ce sont les femmes qui en font les frais.

Le sport étant devenu une entreprise rentable dans la bataille économique de l’industrialisation mondialisée, la recrudescence de la prostitution liée à des rassemblements sportifs, a réellement pris de l’ampleur avec les Jeux Olympiques d’Athènes. C’est pourquoi la Coupe du monde de football qui attire des millions de spectateurs en Allemagne est une aubaine pour les marchands du sexe. A cette occasion, l’industrie du sexe a construit un gigantesque complexe prostitutionnel qui s’exhibe sur 3000 m2. Tout y est conçu pour engranger les meilleurs profits. Spéculant sur une demande accrue et en vue de rentabiliser ces investissements, les « entrepreneurs du sexe » prévoient d’« importer » des milliers de femmes pour répondre à la demande. On estime à plus de 40 000 le nombre de femmes provenant des pays Baltes, de l’Europe de l’Est et d’Afrique qui seront contraintes de se prostituer par tous les moyens.

Pour qu’un monde sans prostitution reste possible, des associations féministes abolitionnistes en France dénoncent cette industrialisation du commerce du sexe d’une ampleur inégalée qui frise l’horreur et le sordide. Regroupées autour de la pétition internationale « Acheter du sexe n’est pas un sport » (http://catwepetition.ouvaton.org) lancée par la Coalition Contre la Traite des Femmes (CATW), plus de 60 organisations, partis et syndicats mènent une campagne pour s’opposer au trafic des femmes à des fins de prostitution. Des initiatives multiples ont eu lieu dans toute la France. Quant au gouvernement français, celui-ci brille par son silence, alors qu’il n’avait eu de cesse par sa loi de Sécurité intérieure de transformer les prostituées en délinquantes, rendant ainsi encore plus vulnérables celles et ceux qui sont aux mains des réseaux.

Pourquoi de telles régressions ? Pour l’industrie du sexe, le développement de la prostitution représente un marché potentiel très profitable, au même titre que n’importe quel service. Pour déculpabiliser ceux qui en tirent profit, l’industrie du sexe cherche à banaliser cet esclavage sexuel moderne en faisant reconnaître la prostitution comme une profession. Pour y parvenir, il s’agit pour eux d’éliminer les instruments qui rendent illégal l’exploitation du corps des femmes. Il leur faut lever la position abolitionniste (ratifié par l’ONU dans la Convention du 2 novembre 1949 dont l’Etat français se réclame toujours) afin de créer le rapport de force qui obligera les pays de l’Union européenne à adopter une position réglementariste qui assimile la prostitution à une profession.

A Pékin, en 1995, à la 4ème Conférence Mondiale sur les Femmes, l’Allemagne et les Pays-Bas ont fait introduire dans la plateforme finale d’action une distinction entre « prostitution libre » et « prostitution forcée », cela revenait en réalité à justifier les mesures prises contre le trafic des femmes et non contre la prostitution en tant que telle. Cette position est démagogique. Faut-il encore rappeler que les femmes n’optent jamais librement pour la « profession » de prostituée, mais y sont contraintes pour des raisons économiques et le plus souvent par la violence.

Ainsi, nous voyons combien la mondialisation libérale vit de l’aliénation des êtres en leur demandant d’être avant tout des consommateurs, nie et méprise la liberté des individus, crée et entretient la confusion entre libéralisme et liberté, profit et partage.

Le Réseau Féministe « Ruptures » rappelle que l’acheteur de services sexuels, trop longtemps ignoré, est le principal responsable du système prostitutionnel. C’est pourquoi nous nous opposons à la légalisation de la prostitution comme profession et militons pour la pénalisation du client et des proxénètes.

14 Juin 2000.

Monique Dental, animatrice du Réseau Féministe « Ruptures »

Contact : monique.dental@wanadoo.fr

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