Déclaration : La violence à l’égard des femmes et des filles reste une crise collective urgente de notre époque

Publié le 25 nov. 2025

Publié par MenEngage Alliance

Alors que le discours sur les « hommes en crise » occupe une place de plus en plus importante dans le débat public et médiatique, l’Alliance MenEngage met en garde contre le risqué que cette question occulte la crise mondiale de la violence à l’égard des femmes et des filles, et appelle à l’élaboration d’un programme unifié et transformateur en faveur de la justice de genre.

Aujourd’hui, à l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles, qui marque le début des 16 jours d’activisme contre la violence basée sur le genre, nous rappelons que la violence patriarcale trouve ses racines dans les inégalités systémiques entre les sexes et les rapports de force, ainsi que dans les notions rigides et stéréotypées de la masculinité.

Les 16 jours d’activisme sont une campagne mondiale qui se déroule chaque année du 25 novembre, Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, au 10 décembre, Journée des droits de l’homme.

Cette année, la campagne #16JoursDeActivisme arrive à un moment où le public s’intéresse de plus en plus aux « hommes et à la masculinité ». Dans ce contexte, nous appelons à la reconnaissance et à l’engagement envers un programme commun dans lequel les efforts visant à améliorer le bien-être des hommes s’inscrivent explicitement dans une approche de la justice de genre. Reconnaître cela et agir en conséquence est une base indispensable pour un changement positif pour tous.

Les données mondiales les plus récentes sur la violence à l’égard des femmes et des filles sont alarmantes et nous rappellent qu’il s’agit d’une crise des droits humains qui n’a guère diminué, voire pas du tout, depuis plus de deux décennies :

On estime que 840 millions de femmes—près d’une femme sur trois dans le monde — ont subi des violences physiques et/​ou sexuelles au moins une fois dans leur vie.
Au cours des 12 derniers mois seulement, 316 millions de femmes (soit 11 % des femmes âgées de 15 ans et plus) ont été victimes de violences physiques ou sexuelles de la part d’un partenaire intime.
À l’échelle mondiale, environ 50 000 femmes et filles ont été tuées par leur partenaire intime ou d’autres membres de leur famille en 2024, soit une moyenne de 137 vies chaque jour.
24 % des adolescentes et des jeunes femmes— soit près de 19 millions — ont subi des violences physiques et/​ou sexuelles de la part de leur partenaire intime avant l’âge de 20 ans.
Les personnes transgenres sont quatre fois plus susceptibles que les personnes cisgenres d’être victimes de crimes violents

La majorité des violences faites aux femmes et aux filles étant le fait d’hommes, ces chiffres soulignent que ce problème est une réalité persistante, systémique et délibérée dans les sociétés du monde entier. En tant qu’alliance mondiale appelant les hommes et les garçons à s’engager en faveur de l’égalité des genres, de la justice climatique et sociale, nous réaffirmons notre conviction que cette réalité doit changer de toute urgence.

Nous assistons à un changement notable dans le débat public, l’élaboration des politiques et les flux de financement qui traitent les questions de genre chez les hommes et les garçons de manière isolée du travail de transformation et d’égalité des genres. Nous appelons à une approche holistique qui reconnaisse et cherche à transformer les causes profondes de la violence sexiste : les normes, les idées et les systèmes patriarcaux qui ont des conséquences négatives pour les hommes et les garçons et qui sous-tendent la violence à l’égard des femmes, des filles et des personnes de diverses identités de genre.

Un intérêt commun pour la justice de genre

Comme nous le soulignons dans notre récent rapport, 10 façons d’impliquer les hommes et les garçons à lutter contre les réactions négatives, nous pensons que les hommes et les garçons ont un intérêt commun à soutenir activement une vision transformatrice de l’égalité des genres et la prévention et l’élimination de toutes les formes de violence sexuelle et sexiste, tant en ligne que hors ligne. En tant qu’êtres sexués, les hommes et les garçons sont particulièrement bien placés pour dénoncer et remettre en question les normes patriarcales, en développant pleinement leur capacité à rejeter la violence et à adopter une attitude bienveillante.

Comme nous le préconisons dans nos 10 recommandations politiques tirées des enseignements tirés d’un travail transformateur efficace avec les hommes et les garçons pour une égalité durable des genres, « le travail visant à promouvoir l’égalité des genres doit avoir pour objectif de transformer les normes de genre, les stéréotypes et les masculinités patriarcales, et inclure l’éradication des préjugés sous-jacents qui façonnent les notions et expressions néfastes de la masculinité ».

La période des 16 jours comprend la commémoration d’un massacre misogyne de 14 jeunes femmes dans une université de Montréal, au Canada, en 1991. La campagne du Ruban blanc, née de cette tragédie, appelle les hommes et les garçons à s’engager à né jamais commettre, excuser ou passer sous silence les actes de violence à l’égard des femmes.

La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes de cette année appelle à mettre fin à la violence numérique. Nous réaffirmons notre appel collectif passé sur la question de la violence sexiste facilitée par la technologie. Les espaces numériques font partie intégrante de la vie de milliards de personnes à travers le monde. Pourtant, ils reflètent et amplifient souvent les inégalités structurelles et la violence du monde hors ligne. Du harcèlement en ligne individualisé aux campagnes misogynes coordonnées, la violence sexuelle et sexiste (VSS) dans les espaces numériques trouve ses racines dans les mêmes normes patriarcales qui alimentent les préjudices hors ligne.

En tant qu’alliance regroupant plus de 1 000 membres dans plus de 90 pays, nous exhortons les décideurs politiques à intensifier d’urgence leurs efforts en faveur de la transformation des relations entre les sexes afin de démanteler les normes de genre rigides et stéréotypées et les inégalités de pouvoir patriarcales qui sont à l’origine de toutes les formes de violence sexiste. Nous appelons les professionnels des médias à aller au-delà du discours sur les « hommes en crise » et à raconter toute l’histoire d’un monde qui doit de toute urgence s’attaquer aux causes profondes des inégalités et de la violence sexiste. Et nous appelons tous les hommes et les garçons à se mobiliser pour s’attaquer aux causes profondes des inégalités entre les sexes et démanteler les structures qui continuent de rendre le monde injuste et inégalitaire.

Ce faisant, nous pouvons ouvrir la voie à un monde différent, où les femmes, les filles et les personnes de tous genres vivent à l’abri de la violence, et où les hommes né sont plus considérés comme étant en crise.